La réécriture de mon roman ou comment passer son temps à réinventer sa propre histoire ?
J’en ai déjà parlé un petit peu en fin d’année, je me suis mise à la réécriture de mon roman jeunesse Megumi - Les Monts Enchantés. Ça m’a pris énormément de temps (ce qui explique ma très longue absence sur le blog, désolée ^^).

Je devais proposer mon manuscrit à une maison d’édition qui le trouvait déjà prometteur en décembre (2015), mais c’était loin d’être fini. Heureusement, le comité de lecture m’a accordé un délai supplémentaire. Cette fois ça y est, il est au point et je leur ai envoyé.
Et je me suis dit : « Tiens, et si en attendant leur réponse j’écrivais un petit topo sur mon blog pour dire à mes gentils lecteurs comment je m’y suis prise pour me démêler les pinceaux ». Alors nous y voilà ! Je ne vais pas vous proposer une méthode de réécriture (car je n’en ai suivi aucune. Aucune rigueur, rien !). Je vais plutôt vous raconter comment j’ai avancé, ce que j’ai revu et pourquoi. C’est parti !
Reprendre le schéma narratif
La première chose que j’ai faite, c’est relire mon ancien manuscrit en notant les différents éléments du schéma narratif tels qu’ils apparaissaient :
- la situation initiale : présentation de Megumi (19 ans, future étudiante) et de la situation dans laquelle elle se trouve au début de l’histoire.
- l’élément perturbateur : apparition de Tiny dans sa chambre et révélation sur les Monts Enchantés et la sorcière maléfique.
- les péripéties :
- dans les Monts Enchantés,
- rencontre avec toutes les créatures magiques,
- découverte de la prophétie,
- apprentissage du combat,
- recherche du collier de défense magique,
- naissance d’une romance entre Megumi et le prince,
- interruption de la guerre chez les humains,
- début de la bataille,
- mort de la sorcière,
- découverte d’un autre manipulateur.
- l’élément de résolution : le manipulateur est achevé et la guerre prend fin.
- la conclusion ou situation finale : Megumi est retournée à sa vie dans le monde des humains, le prince vient lui rendre visite.
Ensuite, il fallait réfléchir à ce que mes changements modifieraient dans ce schéma. Mon idée était de réécrire l’aventure avec une Megumi de 12 ans tout en incrustant davantage les éléments de sa vie japonaise (car oui, l’histoire se déroule au Japon). Dans ma première version, c’était déjà le cas, mais j’avais oublié quelques détails importants comme le fait que les japonaises ne sont pas rousses, par exemple. Bref, il était temps, aux vues de ces deux éléments importants, de faire le ménage.
Quels éléments doivent disparaître ? Lesquels doivent apparaître ?
Megumi
D’abord, il fallait revoir la situation de Megumi. Elle a désormais 12 ans, il fallait donc repenser sa vie, son mode de pensée et les raisons pour lesquelles elle quitte son village pour aller à Sapporo. Ce petit élément de rien du tout implique la réécriture totale de tout le roman.
Les réactions de Megumi
Elle est désormais une enfant. Elle est plus curieuse de l’aventure, plus insouciante qu’une adulte. Elle fonce tête baissée pour se faire de nouveaux amis et avoir du fun.
Terminé les histoires à l’eau de rose !
Le prince est un adulte, Megumi une petite fille. Il fallait supprimer toute leur histoire d’amour (ce qui m’a fendu le cœur, même si au final, c’est bien mieux !)
Insertion des parents de Megumi
Elle a beau vivre au Japon, ses parents sont présents dans sa vie (pas comme ceux des adolescents dans les mangas ^^). Son père joue même un rôle primordial, histoire que le mérite ne revienne pas qu’aux êtres magiques.
La vie au Japon
Ce changement là n’en était pas vraiment un, mais en relisant je me suis rendue compte que le pays ne servait qu’à situer l’action, mais n’avait pas le moindre intérêt. Aucun élément de la vie de Megumi ne faisait référence à son pays. Il fallait remédier à ça.
Éléments physiques
Sans vouloir entrer dans le cliché, Megumi ressemble maintenant à une petite japonaise. Elle a les yeux bruns et les cheveux noirs. Elle n’est pas très grande, elle est polie et elle aime les choses mignonnes.
Éléments typiques
Je parle plus de choses qui ont trait au Japon, par exemple les Onsen (sources chaudes), le festival de la neige à Sapporo, les katana, les bento et tout un tas de petits éléments qui nous rappellent, au fur et à mesure de l’histoire, que nous nous situons toujours au pays du soleil levant, même si les Monts Enchantés sont plus un « autre monde ».
Une histoire pour les enfants
Le roman s’adressait déjà, à la base, à un jeune public, mais le personnage de Megumi, jeune adulte, n’aidait pas le lecteur à s’insérer dans l’histoire. Remplacer la jeune femme par une enfant permet de mieux captiver les jeunes lecteurs. Seulement, l’histoire doit être claire et compréhensible du début à la fin. Il a donc fallu que je la simplifie, tout en restant cohérente. Dans ma première version il y avait beaucoup de digressions qui nous faisaient un peu tourner en rond. Cette fois, on va droit au but.
Adieu le collier magique
Une bague magique, un collier magique… Non ! La bague suffisait amplement. J’ai remplacé le besoin du collier pour quitter la protection magique par une stratégie d’attaque plus rigolote et qui implique davantage les autres personnages de l’histoire.
Un seul grand méchant, c’est bien suffisant !
Effectivement, tout le long de l’histoire les héros s’attendent à affronter la sorcière maléfique. Ça se produit bel et bien, mais dans la première version, quand on croyait que tout était gagné, un nouveau méchant faisait son apparition, révélant que c’était lui qui manipulait la sorcière. En fait, c’était lui le Boss. OK. Mais c’est un peu trop pour de jeunes lecteurs qui n’attendent qu’une chose, c’est que les héros gagnent ! Donc j’ai supprimé ce grand méchant, en laissant simplement un petit élément dans l’histoire qui permettrait de le faire réapparaître dans une suite. Au cas où…
La guerre, la guerre…
La guerre est omniprésente dans le monde magique, mais aussi chez les humains que la sorcière manipule pour déstabiliser le prince. Dans cette nouvelle version, j’ai rendu la guerre des humains un peu plus vague, car perçue du point de vue de Megumi. C’est une enfant qui ne comprend pas tout ce qu’il se passe et ne fait que répéter ce qu’elle entend. Donc, on sait que le monde est en danger, mais on se concentre désormais sur un seul aspect des problèmes, pour ne pas perdre le lecteur en route.
Le point de vue narratif
J’ai aussi dû revoir le point de vue de la narration. Avant, j’avais un narrateur omniscient qui se contentait de raconter l’histoire. Maintenant, j’ai un narrateur omniscient qui préfère se balader sur l’épaule de Megumi pour nous raconter l’histoire quasiment de son point de vue à elle. Il arrive parfois, au cours de l’histoire, que Megumi ne soit pas disponible pour nous faire part de sa vision. Ce n’est pas grave, le narrateur est omniscient, il peut sauter sur l’épaule de quelqu’un d’autre ^^. Je trouve cette approche plus sympa pour les jeunes lecteurs.
Plus d’humour, même quand c’est triste
Le but de l’histoire est que le lecteur prenne du plaisir. Je me suis donc efforcée de rendre mes personnages plus rigolos et certaines situations moins dramatiques. J’espère que ça marche !
Relecture et correction
Des fiches personnages
Au fur et à mesure de la réécriture, certains de mes personnages se sont transformés et d’autres ont carrément fait surface. Il fallait donc que je fasse le point sur leurs caractéristiques pour conserver leur personnalité tout du long ou bien mettre en avant leur évolution. J’ai donc rédigé de brèves fiches pour chaque personnage afin de cibler leur caractère. Pendant la relecture, ces fiches m’ont été utiles afin de manier les dialogues correctement. Si un trait distinctif apparait dans une réplique, ça permet de minimiser le nombre d’incises (« dit-il ») et de rendre la lecture plus fluide.
Une correction habituelle
Après tout ce remaniement, il faut prendre un moment pour relire le roman sans tenir compte du sens, juste en faisant attention aux fautes, aux répétitions. La galère quoi. Mais c’est inévitable !
Pour conclure, je dirais que ce travail était titanesque. J’ai plus l’impression d’avoir écrit une histoire que de l’avoir réécrite. C’est un manuscrit tout neuf que j’ai proposé à la maison d’édition et quand ils m’ont confirmé qu’il serait lu, j’ai sauté de joie ! Je suis contente que quelque part, peut-être en ce moment-même, quelqu’un est en train de lire les aventures de la petite Megumi dans un monde enchanté. Même si j’ai passé beaucoup de temps et consommé beaucoup d’énergie à revoir ce manuscrit, je suis ravie de l’avoir fait et je ne regrette rien. S’il n’est pas accepté, tant pis.
Et vous, vous arrive-t-il souvent de retravailler à fond une histoire ?