Akemi no sekai

Lectures · Films et séries · Mes écrits · Samare · BD · Japonais · Créations artistiques · Bric à brac · Rédaction
À propos
Les derniers films vus · Recette de peinture à la terre d’ocre

💖 La vie rêvée des chaussettes orphelines de Marie Vareille

Publié le 15/10/2023 dans Lectures.

Un titre intrigant, une autrice inconnue : il ne m’en fallait pas plus pour avoir envie de lire ce roman. Ou peut-être que si… Je l’ai acquis il y a pas mal de temps, après avoir visionné une vidéo d’Audrey, de la chaîne Youtube Le souffle des mots sur laquelle elle parle de ses lectures. Elle a dû me convaincre.

Résumé

couverture du livre représentant des pieds habillés de chaussettes dépareillées à côté d’une tasse de café fumant.

Alice a quitté New York pour refaire sa vie à Paris. Elle emménage dans un studio avec son chat, David, et elle tente par-dessus d’oublier les traumatismes de son passé. Plus de séances de psy pour elle, elle se fait expédier une ordonnance des États-Unis pour continuer à prendre somnifères et antidépresseurs. Mais l’angoisse la guette et les crises ne sont pas loin, malgré la discipline et les troubles obsessionnels compulsifs qui rythment son quotidien.

Elle trouve un emploi dans une start-up au concept bien singulier : créer une application pour permettre aux gens de réunir des chaussettes devenues orphelines. Les deux directeurs sont aussi différents que le jour et la nuit. L’un, optimiste, exubérant et prêt à tout, a déjà échoué sur plusieurs projets, l’autre plus renfermé et terre à terre, est un prodige dans la programmation d’application. Alice ne sait pas trop où est sa place, elle tente de s’adapter à ce nouvel environnement et fait la connaissance de ses collègues en gardant à l’esprit qu’elle doit ériger des barrières autour d’elle pour éviter tout rapprochement. En effet, elle a des secrets et qui sait quand et comment son passé va refaire surface ?

Cependant, elle s’attache à ses collègues, apprend à aimer sa nouvelle vie et des signes du destin semblent lui être jetés à la figure pour l’obliger à accepter son passé. Elle se fait des amis et tombe même sous le charme de Jérémy, l’un de ses deux patrons. Elle ne pourra pas garder ses distances et quand la vérité sur son passé éclate, elle sombre de nouveau.

Ce que j’en pense

J’ai rarement lu un roman aussi bien mené. Il est excellent.

Alice est un personnage perturbé, attachant, dérangé et drôle qui pousse le lecteur à la sympathie. Nous faisons sa connaissance entre son journal de 2011 et les faits de 2018 et d’emblée, on sent que quelque chose cloche, qu’elle en a bavé. Son humour et ses préoccupations sont différentes au regard de sa vie, qui semble avoir été complètement bouleversée. On veut comprendre ce qui est arrivé, pourquoi elle est si angoissée et surtout, si ses nouvelles connaissances peuvent l’amener à aller mieux.

La grande révélation (que je ne répèterai pas ici, pour ne pas me gâcher le plaisir d’une éventuelle relecture dans mes vieux jours) est choquante pour deux raisons :

C’est tout bonnement extraordinaire, à la fois inattendu et évident. Le récit est parfaitement mené. Le point de vue narratif interne, permet de rester focalisé sur le personnage, de ne voir que ce qu’elle voit et de ce fait, de comprendre les choses aux bons moments – d’autant plus que, perturbée, Alice ne mentionne pas son passé (le simple fait d’y penser la plonge dans une angoisse profonde).

Grâce à ce point de vue narratif, les relations qu’Alice s’interdit d’entretenir sont reléguées au second plan. Ainsi, son histoire d’amour est minimisée, voire niée, ce qui nous permet d’en apprendre encore plus sur elle, sur sa façon de penser et sur ses sentiments, sans que l’on se disperse en amenant des éléments sur Jérémy dont on n’aurait pas besoin. Le sujet principal du roman est la gestion du drame, les conflits internes, la santé mentale d’Alice, et le récit reste focalisé sur la profondeur du personnage. Le reste sert de renfort, de soutien et d’ancrages. Le dosage est subtil, les indices sont saupoudrés avec parcimonie. Il s’agit d’un chef-d’œuvre.


Conclusion

J’adore. Énorme coup de cœur.

C’est typiquement le genre de roman qui me plaît : personnage blessé qui, dans sa vie banale, doit trouver les ressources et attraper les bouées qui lui sont lancées pour s’extirper des profondeurs du désespoir et remonter vers la lumière ; des douleurs à surmonter, des amis à apprendre à aimer, le courage de ne pas se laisser dériver. C’est la beauté de l’âme humaine – que j’ai parfois du mal à trouver dans ce monde de fous – qui est mise en avant. Et la conclusion pour s’en sortir est simple et ne tient qu’en un mot : l’amour. C’est toute la beauté de ce livre.

Je rêve de parvenir à écrire un tel bijou un jour…