Les temps du récit
Lorsque l’on commence à écrire son récit, il convient de se poser deux grandes questions (qui sont d’une importance capitale) :
- Quel type de narrateur vais-je utiliser ? Cela fera l’objet d’un prochain article.
- À quel temps vais-je écrire ? Et là, on entre dans le vif du sujet !
Le présent
Il est possible, bien sûr, d’écrire un récit au présent (de l’indicatif, s’entend). Ce n’est pas forcément le plus simple, mais ça peut avoir son importance selon le type de récit dans lequel on se lance.
Si on veut jouer à fond sur le suspens, par exemple, il peut-être intéressant de tout rédiger avec ce temps pour que le lecteur découvre absolument tout ce qui arrive aux personnages en même temps que ceux-ci. C’est un moyen de se trouver plus proche des personnages. Pourquoi pas…
Sinon, il faut utiliser les temps du récit, à savoir, l’imparfait et le passé simple (de l’indicatif).
Vous allez me dire, « À quoi servent ces deux temps? », « Est-ce qu’il faut en choisir un des deux ? ». Eh bien… Non ! Ces deux temps du récit sont complémentaires et ont chacun une fonction particulière. Nous allons voir lesquelles.
L’imparfait
L’imparfait est le temps de la description. Il s’utilise lorsque l’on relate des faits à durée indéterminée :
Il pleuvait et l’eau dégoulinait jusque dans mes bottes.
Extrait de la première version de mon Samare
Ou pour décrire des paysages, des personnages, des évènements, etc… :
Tiny portait un pull-over en laine bleu et un short assorti. Ses yeux violets ne cessaient de cligner dans ma direction et je commençais à me sentir inquiète.
Extrait de la première version de mon Megumi - Les Monts Enchantés
L’imparfait a tendance à étaler les choses en longueur pour que le lecteur ait le temps de bien les assimiler. Il est utilisé pour rédiger la situation initiale et la situation finale (Cf. le schéma narratif).
Le passé simple
Le passé simple quant à lui est le temps de l’action. Il sert à narrer les aventures des personnages et s’emploie pour lancer une suite d’actions rapides et brèves qui font avancer le récit jusqu’à son dénouement. Certains éléments de la phrase permettent souvent de nous aider à déterminer quel temps il faut utiliser, par exemple « tout à coup », « aussitôt », « soudain », etc… Ces éléments suggèrent en effet la soudaineté et la brièveté des actions.
Il sauta vers moi d’un seul bond, plongea** ses yeux dans les miens et m’attrapa la tête à deux mains pour la secouer. Je hurlai comme une folle.
C’est ce temps qui sera principalement utilisé pour rédiger l’élément perturbateur, les péripéties et l’élément de résolution.
Attention…
Il faut faire très attention à la conjugaison, notamment pour les verbes du premier groupe (en -er). En effet, à la première personne du singulier (je), l’imparfait prend un s alors que le passé simple non. C’est ce qui permet de les différencier.
Je marchais le long du trottoir en prenant tout mon temps. Je n’étais pas pressée de rentrer.
Dans cet exemple, on utilise l’imparfait, car le personnage étale volontairement l’action de marcher. Le récit en vient donc à décrire le fait de marcher (en prenant tout son temps).
Je marchai, trébuchant sur des cailloux. Mes pieds accélérèrent le mouvement comme s’ils sentaient que j’étais en danger. Il me fallait fuir.
Ici, on emploie plutôt le passé simple, car le personnage est en danger et fuit, c’est une action brève entrainée par un évènement soudain (être pourchassé par exemple).
Cas particulier et utilisation d’un temps supplémentaire
Qui dit temps du récit dit auxiliaires au passé.
Forcément, vous allez devoir, selon la tournure de vos phrases ou les évènements relatés, utiliser également le passé-composé (si vous rédigez au présent de l’indicatif – et dans ce cas les auxiliaires seront conjuguées au présent) ou le plus-que-parfait (si vous utilisez les temps du récit au passé).
Dans quel cas doit-on utiliser le plus-que-parfait ?
Il s’agit de l’employer lorsque, dans le récit (qui est écrit à l’imparfait et au passé simple), le narrateur relate un évènement passé. Cela signifie, pour le lecteur, que l’évènement en question est encore plus ancien que ce qu’il lit, qui relève déjà du passé.
Ne paniquez pas, voici un exemple :
Cela signifiait (imparfait) que ce que Martin lui avait raconté (plus-que-parfait) datait de plus longtemps que ce que Johanna croyait.
Dans cet exemple, le narrateur informe le lecteur que Martin a raconté quelque chose à Johanna. Or, comme le récit est écrit à l’imparfait, le fait que Martin ait raconté cet évènement à Johanna est antérieur au fait que le narrateur nous en informe. Vous me suivez ? C’est dans ce type de cas qu’il faut employer le plus-que-parfait.
En général, relire une phrase à voix haute vous permet de « sentir » que quelque chose est bancal dedans. L’utilisation des temps du récit est assez intuitive pour qui sait écouter.
Une petite règle à ne pas oublier…
Cela nous amène à la règle à laquelle il faut penser et que la plupart des gens ne connait pas : l’accord du participe passé avec l’auxiliaire.
Avec l’auxiliaire « être »
C’est le cas le plus facile ! Le participe passé s’accorde toujours en genre et en nombre avec le sujet, même si celui-ci est placé après le verbe.
Ils s’étaient rencontrés par hasard.
Les enfants désobéissants doivent être punis.
Avec l’auxiliaire « avoir »
Alors là, c’est une autre histoire ! Le participe passé s’accorde en genre et en nombre avec le COD (complément d’objet direct) uniquement si celui-ci est placé avant le verbe.
Comment trouve-t-on le COD de la phrase ? En se posant la question suivante : Quoi? ou Qui? On peut en général le remplacer par un pronom (le, la, les, que, qui…).
Ce sont les fleurs que j’ai achetées.
Décortiquons cet exemple :
J’ai acheté quoi ? Les fleurs, qui est repris dans la phrase par « que », placé avant l’auxiliaire « ai ». Le COD est donc au féminin, pluriel. Il faut donc accorder « acheter » au féminin et au pluriel.
En revanche :
J’ai acheté des fleurs. (COD placé après l’auxiliaire : pas d’accord)
Les fleurs ont été achetées. (pas de COD : « été » non accordé puisque associé à l’auxiliaire « ont », mais « achetées » accordé au féminin pluriel, car associé à l’auxiliaire « été »)
On peut aussi reformuler la règle en disant que le participe passé s’accorde en genre et en nombre avec le nom ou le pronom qui se rapproche le plus du participe par le sens que prend la phrase. Au final, on retombera toujours sur le COD.
Voilà, vous savez tout ! Les temps du récit n’ont plus de secret pour vous, vous pouvez vous lancer !
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