Akemi no sekai

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À propos
Un endroit où écrire · 💖 Abyss d’Orson Scott Card

Show, don’t tell !

Publié le 12/10/2015 dans Rédaction.

Aujourd’hui, je vais vous parler d’une technique d’écriture qui me donne du fil à retordre : le show, don’t tell. Nous allons voir ce que c’est, comment on peut le travailler et en quoi il me pose des problèmes.

Livre ouvert avec des éléments de paysage en relief qui sortent des pages.
Don’t tell me the moon is shining ; show me the glint of light on broken glass.
Citation d’Anton Chekhov

« Ne me dis pas que la Lune brille ; montre-moi le reflet de sa lumière sur le verre pilé. » Montre-le, ne le dis pas !

Le show, don’t tell, qu’est-ce que c’est ?

Eh bien, c’est une manière de décrire les sentiments, les actions, les pensées des personnages pour rendre une scène plus intense. L’idée, c’est de donner un maximum d’éléments au lecteur. Il se forme ainsi une image de ce qui se passe et il le comprend et le vit plus facilement.Il faut montrer (show) au lecteur les ressentis des personnages et pas se contenter de les dire (don’t tell).

Show the readers everything, tell them nothing.
Citation d’Ernest Hemingway

« Montre tout aux lecteurs, ne leur dis rien. »

Les avis sont divergents quant à l’emploi partiel ou total de cette technique. Est-ce que je montre tout ? Ou bien je préfère dire les choses les moins importantes et montrer les éléments primordiaux ? En tout cas, on dirait que tout le monde s’accorde sur son importance.

Orson Scott Card, un auteur que j’ai découvert récemment avec Abyss, nous dit que montrer consomme tellement de ressources et de temps, autant pour l’auteur que pour le lecteur, qu’il faut se contenter de le faire dans les scènes poignantes ; celles qui ont un côté dramatique et qu’il faut que l’on ressente au plus profond de nos tripes (j’ai un petit peu reformulé cette partie à ma sauce ^^).

Je suis assez d’accord avec lui. L’idée est là. Elle est logique, mais elle me bloque aussi comme c’est pas permis !

Ma rencontre avec cette technique

Comme je vous l’ai déjà rapidement dit dans mon article sur mes projets, je suis actuellement plongée dans la réécriture de mon premier roman. J’ai cru le terminer en 2010, mais je me suis trompée – ça arrive –, et j’ai finalement décidé de le rendre plus intéressant ! J’ai commencé par reprendre le premier chapitre, que j’ai relu, corrigé et décortiqué dans tous les sens avant de le corriger une nouvelle fois, puis je l’ai proposé à la lecture sur ce forum pour avoir des avis et des conseils. C’est là que j’ai commencé à me casser la tête dessus…

Pourquoi je n’y arrive pas ?

D’abord, parce que je décris déjà les émotions ou les actions intuitivement, quand je sens que c’est nécessaire – enfin, je crois… Du coup, quand mes bêta-lecteurs (sur le forum de partage) me disent que je dois montrer les sentiments à tel ou tel endroit, je ne vois pas pourquoi, ni comment je dois procéder.

Pourquoi ?

C’est la deuxième raison qui fait que ça coince pour moi : parce que ça ajoute des descriptions que je trouve inutiles.

Exemple

Prenons un exemple – que l’une de mes bêta-lectrices a sélectionné dans mon texte pour essayer de m’expliquer ce qui clochait – pour voir concrètement ce que ça donne :

Megumi se mit à paniquer.

Cette personne me dit donc : « C’est-à-dire, que ressent-elle physiquement ? »

Ses mains commencèrent à trembler et son cœur entama un furieux concerto de percussions. Puis son cri de détresse troubla le silence du quartier.

Ses mains tremblent et son cœur s’emballe. Je l’ai écris dans la suite du texte, donc selon moi, c’est qu’il était nécessaire de le préciser. J’ai montré la manifestation de sa panique. Seulement ici, j’aurais dû la montrer avant de dire qu’elle paniquait, mais c’est une autre histoire ^^.

Le problème, c’est que juste après son moment de panique, mon personnage se met à crier. Là, « il n’y a aucun élément » qui nous indique le passage de l’état de panique à celui de « détresse » – toujours selon ma bêta-lectrice. C’est un problème pour elle. Pas pour moi. Elle considère que ça donne « un effet artificiel », moi je considère que c’est normal. Mon personnage crie. C’est instantané. Elle panique d’abord, en tremblant, puis elle crie. Normal. Que devrais-je donc écrire ?

Une description de ce genre peut-être :

Ses lèvres s’écartèrent légèrement tandis que ses yeux s’ouvraient en grand et elle finit par pousser un cri de détresse.

20 mots. 20 mots pour simplement dire qu’elle crie. En fin de compte, elle est censée se mettre à crier quasiment aussitôt que son cœur accélère sous l’effet de la panique. Du coup, je ne comprends pas l’intérêt.

Alors concrètement, qu’est-ce qu’on fait ?

James Scott Bell (que je n’ai jamais lu, mais qui est cité par Wikipédia sur le sujet) dit que trop de show, don’t tell finirait par dégoûter le lecteur. Cette technique doit être utilisée, selon lui, pour rendre des scènes ou des passages plus vivants et intenses. Lorsque l’action doit être courte, ça ne sert à rien de s’étaler dessus. Oui monsieur ! Je suis complètement d’accord !

En fait, d’après ce que je comprends, il ne faut pas montrer tout le temps, de toutes les manières possibles. Il faut plutôt sélectionner les évènements à mettre en avant et choisir son vocabulaire pour apporter des descriptions visuelles au lecteur.

Certaines scènes ont plus d’importance que d’autres dans le récit. Elles permettent de mieux connaître les personnages ou de mieux saisir la tragédie ou l’euphorie d’une action. Il faut donc se concentrer sur celles-là.

Par exemple, si mon personnage principal s’étouffe parce qu’il a avalé des algues d’une traite, je peux dire :

Ses yeux se remplissent de larmes. Son visage prend la couleur d’une prune trop mûre et il tousse à s’en décrocher les poumons.

En revanche, s’il est attendrit par la maladresse de son amie qui ne parvient pas à tenir trois bûches dans ses bras, inutile de donner ce genre de précision :

Ses lèvres s’étirent sur un sourire tendre, de part et d’autre de ses oreilles.

Dire qu’il sourit suffira. Du moins, c’est ce que je pense. Trop en dire pour pas grand-chose pourrait facilement lasser le lecteur.

Ensuite, le choix du vocabulaire est primordial. D’abord, pour éviter d’écrire des phrases lourdes et difficiles à comprendre, mais aussi pour susciter les bonnes émotions chez le lecteur.

Pour en revenir à mon exemple de mangeur d’algues, je préfère utiliser les mots « ses yeux se remplissent de larmes » plutôt que « il pleure »; ou encore « son visage prend la couleur d’une prune trop mûre », plutôt que « il vire au violet ».

Les mots permettent d’apporter la profondeur voulue. Il faut se forcer à éviter certains verbes génériques comme « penser », « savoir », « réaliser », « estimer », etc. Pour montrer, il faut apporter des détails qui évoquent quelque chose au lecteur comme une odeur, un goût, un son, une couleur, etc.

Conclusion

Bien sûr, je suis contente que des bêta-lecteurs m’aient fait remarquer que j’avais des lacunes sur le show, don’t tell. Ça donne à réfléchir et ça m’aide beaucoup. Même si j’ai parfois tendance à ne pas être d’accord avec tout le monde sur le choix des passages à montrer.

J’ai aussi tendance à penser que même si tous ces éléments permettent au lecteur de mieux visualiser la scène, il ne la voit pas par sa propre imagination. C’est triste, mais il ne voit finalement que ce que l’auteur lui montre…

Et vous, qu’en pensez-vous ? Connaissiez-vous cette technique ? L’utilisez-vous ? Si vous avez des conseils à me donner, je prends !