Akemi no sekai

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Sept jours pour une éternité de Marc Levy

Publié le 26/10/2021 dans Lectures.

À la recherche de romance et de comédie, après que les pièces tragiques m’aient miné le moral, j’ai décidé de lire Sept jours pour une éternité de Marc Levy. C’est un roman sorti en 2018 dont le résumé m’a fait penser que je rirai sans doute en découvrant une jolie histoire d’amour.

Résumé

Il a le charme du diable.
Elle a la force des anges.
Pour mettre un terme à leur éternelle rivalité, Dieu et Lucifer se sont lancé un ultime défi. Ils envoient en mission leurs deux meilleurs agents.
Lucas et Zofia auront sept jours sur Terre pour faire triompher leur camp, décidant ainsi qui du Bien ou du Mal gouvernera les hommes.
En organisant ce pari absurde, Dieu et Lucifer avaient tout prévu, sauf une chose…
Que l’ange et le démon se rencontreraient.

Cela promet plein de choses, n’est-ce pas ?

Ce que j’en pense

Points positifs

Couverture du roman aux éditions Pocket, représentant une paire d'ailes d'ange.

L’humour est là, notamment en ce qui concerne les personnalités de Dieu – Monsieur ou Houston – et de Lucifer – Président. Ça m’a bien fait rire que Dieu aime les décollages de fusées et qu’il souhaite se faire appeler Houston du coup. C’est trop marrant quand l’archange Michaël entre dans son bureau en lui disant : « Houston, nous avons un problème. » J’ai aussi apprécié le caractère du Président qui précise à ses visiteurs de ne pas s’asseoir ou qui leur ordonne de se taire alors qu’il leur pose des questions. Pour répondre, ils sont obligés d’écrire !

La personnalité de Lucas, le meilleur agent démoniaque envoyé pour la mission ultime, est intéressante. On le voit dès le départ irrespectueux, lassé, outrageux, mais il respecte certaines choses et en prend soin, comme le petit livre qu’il chipe dans un hôtel parce qu’il le trouve génial – cet ouvrage s’avère être la Bible !

Lucas devient, au fur et à mesure de ses rencontres avec Zofia, plus délicat, plus à l’écoute, mais aussi plus triste. Vers le début de l’histoire, il colle une sacrée tartine à une vieille dans l’avion parce qu’elle s’évanouit de peur lors de l’atterrissage mouvementé. C’est trop marrant, en même temps d’être choquant. Et plus tard, il essaye de devenir bon en aidant un vieillard à traverser le boulevard. J’adore ce passage. Il veut changer pour Zofia, mais c’est physiquement impossible pour lui, ça le rend littéralement malade. Il prend une teinte verte et se retient de vomir. C’est hilarant. Pourtant, quand il demande à Zofia de faire sa part du chemin vers lui aussi, vers le Mal, et qu’il constate sa détresse, il utilise ses ressources de méchant pour sauver la vie d’une femme – en tuant l’homme qui la battait.

Il offre maladroitement des fleurs, il reconnait que l’ange a réussi à le faire basculer vers le Bien, il dit ses sentiments avec fragilité et devient même très romantique. C’est un personnage qui évolue tout au long de l’histoire et il commet quelques erreurs.

J’aime bien aussi le fait que plus Zofia et Lucas se rapprochent et passent de bons moments ensemble, plus le temps vire à l’orage. Le ciel sombre, le vent, les éclairs… L’ambiance est pesante, comme si leur rencontre accélérait la fin du monde. Des détails m’échappent, comme les bris de verre en 7 morceaux identiques par exemple. Il doit y avoir une signification particulière, je ne sais pas. L’ambiance semblait lourde aussi lors de leur première rencontre, quand ils ont échangé leur premier regard. C’était peut-être le passage le mieux écrit. L’intensité était palpable. Mais cette fois également, je n’ai pas compris le sens du verre brisé.

Points négatifs

La personnalité de Zofia, l’ange, est maladroite. Elle a beau essayer d’aider tous les gens autour d’elle, elle se concentre uniquement sur ceux qui entourent sa petite vie. D’ailleurs, quand Lucas l’emmène dans les bas quartiers, elle découvre véritablement l’horreur du monde. Elle a un côté autoritaire qui ne colle pas trop avec ses fonctions « divines » dirons-nous. En plus, elle reproche à Lucas sa gourmandise, mais tombe facilement dans le péché aussi, ne serait-ce que lorsqu’elle lui fait une crise de jalousie. Quand elle mange des céréales en ajoutant du sucre, à la fin, c’est plutôt amusant.

L’histoire est lente et plate, principalement parce que, alors qu’elle a une mission de la plus haute importance à accomplir, Zofia continue son petit train-train. Et elle n’hésite pas à faire des allers-retours en voiture pour des clous. Ils n’ont pas entendu parler de la pollution de la planète au Paradis, entre elle qui roule tout le temps et Dieu qui adore les décollages de fusées…

Bref, il n’y a pas vraiment d’action, et le peu de choses qui se passent sont assez flous. On ne comprend pas bien, par exemple, comment Lucas en arrive à savoir que ceux de son camp ont découvert sa relation avec l’ange et les suivent. Ni, du coup, qui est celui qui leur tire dessus – tirer avec un pistolet sur un ange et un démon ! Ni même pourquoi Lucas peut être blessé, et ce que cela implique. D’après la colère de Président, qui reproche à Houston d’avoir triché en lui disant juste : « Des humains ! », on imagine que l’amour des deux êtres mystiques les fait progressivement perdre leurs pouvoirs, d’ailleurs ils ne voient pas leurs deux « patrons » à la fin. Mais tout cela n’est pas très clair et surtout, on ne voit pas bien ce que ça apporte à l’histoire. D’autant plus que la dernière partie du roman s’appelle « Une éternité ». S’ils sont devenus mortels, et il y a des chances qu’ils le soient, étant donné qu’ils ont pu enfanter comme des humains, ils ne risquent pas de profiter d’une belle éternité comme ils s’en payaient le luxe avant de se rencontrer.

Du coup, je trouve l’histoire plutôt moyenne. La fin est même complètement décevante. On a l’impression qu’en fin de compte, leur histoire se résume à la dernière nuit ensemble, passée sur le banc. Lucas l’a « aimée tendrement » et Zofia dit à l’archange qu’elle a « aimé ». De tout ceci, Dieu conclut qu’il va être grand-père et planifie avec Lucifer ( !) si ce sera un garçon ou une fille. Les deux amoureux sont finalement ensemble, avec des bébés et… Et quoi ? C’est nul ! On ne les voit pas triompher, ils se sont séparés ! On ne les voit pas profiter de leur bonheur, ils ont déjà la responsabilité d’une famille ! Et surtout, on les voit devenir naïfs et aveugles, alors que Dieu et Lucifer sont là, à les surveiller. Ils en ont fait quoi des enfants, ces deux-là ? Ont-ils prévu encore un pari débile ? Cette fin est extrêmement nulle.

En plus, le ton général est trop niais. On peut sans doute écrire une histoire d’amour, en la rendant réellement belle, sans pour autant tomber dans la mièvrerie ridicule. Le romantisme de Lucas est touchant parce qu’il est neuf, il tâtonne, il ne sait pas dire ces choses qu’il ressent pour la première fois et dont il ne soupçonnait pas l’existence. En revanche le côté bon samaritain et les paroles trop « bonnes » de Zofia sont ennuyeux et risibles. D’autant plus que ses amies ont le même genre de mots tendres et non naturels à son encontre.

Enfin, il y a des détails qui semblent importants, puisqu’ils sont répétés encore et encore – la mouette, le pantalon en tweed, l’indiscrétion de Reine qui regarde toujours derrière le rideau, etc. Pourtant, cela m’échappe. La mouette, par exemple : Zofia pense au départ qu’il s’agit d’un des archanges. Il s’avère que non. Alors à quoi sert cette mouette ? Jules, le clochard en tweed, s’avère être un ange vérificateur. Qu’est-ce que c’est ? Pourquoi parlait-il avec Lucas sur les quais, et pourquoi encourageait-il Zofia à s’en rapprocher, s’il savait ce qu’était le jeune homme ? Et pourquoi, à la fin, retrouve-t-il Reine ? Cette dernière savait-elle quelque chose de la véritable identité de Zofia et Lucas ? Il y a trop de mystères. Ou on dit tout, ou on ne dit rien, mais on ne choisit pas d’en dire la moitié en oubliant les miettes laissées en cours de chemin.

Conclusion

Il y a plus de points négatifs que positifs. Même si cette lecture n’a pas été désagréable, je ne recommanderai pas le roman. Il y a beaucoup mieux à lire, c’est certain.

Le découpage de l’histoire en jours impose le découpage du livre en chapitres assez longs, ce qui ne colle pas vraiment avec le côté « roman de gare » de l’ouvrage.

Et personnellement, pour mes écrits futurs, je retiens de cette histoire qu’il ne suffit pas de piocher un sujet amusant, de parsemer quelques touches d’humour et d’avoir un personnage bien construit, pour avoir un bon roman. Le déséquilibre entre les deux personnages principaux est trop important. Et le fait de ne pas tout expliquer sous prétexte qu’il y a quelque chose de mystique est inacceptable. Si on prend la peine de monter toute une organisation avec une Tour cachée consacrée au Bien et au Mal, ainsi qu’un bureau partagé entre les deux patrons, etc, alors les détails doivent coller. D’ailleurs, qui pouvait oublier que les deux missionnaires ne se rencontreraient pas alors que leur tour de contrôle se situe dans le même bâtiment ? Certes, ils n’y pénètrent pas par le même côté, mais il y avait des chances qu’ils se croisent sur la place, non ? Dieu et Lucifer n’ont pas pensé à cela… Ou bien, le premier est plus perfide qu’il veut bien laisser croire et il avait espéré que l’amour ferait triompher le Bien. Qui sait ?


Il ne s’agissait pas là de grande littérature. En tant que personne qui galère sur la même histoire à essayer de fignoler mes personnages depuis quelques années, je peux dire qu’avec un niveau tel que celui de Sept jours pour éternité, ce ne doit pas être très difficile pour Marc Levy de sortir deux romans par an. On pourrait croire qu’il a du talent ; peut-être bien le talent de ne pas se fouler pour rien. Après tout, ses ouvrages rencontrent toujours un très grand succès.